La profession va devoir s'habituer aux nouveaux mécanismes de régularisation
Par Jean-Charles Naimi le 08/10/2010
- Sans surprise, le PLF 2011 propose d’anticiper la taxation aux prélèvements sociaux du compartiment euro des multisupports - Cette nouvelle donne va entraîner tout un système de restitution des excédents perçus plus ou moins complexe, selon l’évolution de la valorisation du contrat
L’article 8 du projet de loi de Finances pour 2011 propose d’aligner le régime d’imposition des produits du fonds en euros des contrats d’assurance vie multisupports sur celui des contrats monosupports exprimés en euros. Les produits du compartiment euro seraient désormais imposés au taux de 12,1 % dès leur inscription en compte annuelle et non plus au dénouement du contrat (1).
Une mesure non neutre sur le plan financier.
Cette mesure d’assujettissement au fil de l’eau serait, selon le gouvernement, « neutre pour l’assuré qui percevra, après comme avant, un revenu net des prélèvements sociaux ».Une telle affirmation est inexacte, le nouveau schéma entraînant mécaniquement une érosion de la performance du contrat dans la mesure où la capitalisation annuelle des intérêts s’appliquera sur une base de départ diminuée.
Le texte précise aussi que, lors du dénouement, l’assiette de la contribution sera calculée déduction faite des produits ayant déjà été soumis à taxation, nets de cette contribution. Ainsi, dans un cas simple faisant intervenir à la fois un rachat total, des unités de compte en progression et une valeur liquidative du contrat supérieure aux versements effectués, l’assiette des prélèvements sociaux sera égale à la valeur totale du contrat diminuée du versement initial et du montant des intérêts nets de prélèvements sociaux taxés lors de leur inscription en compte sur le fonds en euros.
Procédure de ristourne du trop-perçu.
Mais le tableau peut vite se compliquer lorsque la valeur des unités de compte diminue, en sachant que l’épargnant peut alors constater une valeur totale de contrat supérieure ou inférieure, selon les cas, aux versements réalisés. Pour répondre à ces cas de figure, le texte intègre une procédure de régularisation applicable au dénouement du contrat (rachat partiel, total, décès de l’assuré) lorsque le montant de la contribution acquittée sur le support en euros est supérieur au montant de celle calculée sur l’ensemble des produits attachés au contrat. Dans ce cas, l’excédent de prélèvement serait reversé au contrat par l’intermédiaire de l’entreprise d’assurance.
En cas de rachat partiel, le trop-perçu ne serait reversé qu’à proportion du rapport existant entre les primes comprises dans ce rachat et le montant total des primes versées net des primes comprises, le cas échéant, dans un rachat partiel ultérieur (lire l'exemple). La restitution s’effectue par voie d’imputation sur la contribution due par l’établissement payeur à raison des autres produits de placements. A défaut d’une base d’imputation suffisante, l’excédent de contribution non imputé est reporté ou remboursé.
« Le remboursement de l’excédent à l’assuré est un élément bien entendu important, mais nous regrettons le manque de clarté du texte sur la question du taux de prélèvement appliqué. Comment se passera la régularisation en cas d’augmentation de ce taux ? », s’interroge le président de la Faider, Jean Berthon.
Des éclaircissements à obtenir sur les intérêts et produits pris en compte.
Le projet de loi mentionne que les nouvelles modalités de prélèvement s’appliquent aux produits inscrits aux bons ou contrats à compter du 1er janvier 2011, à l’exception de ceux inscrits en compte au titre des intérêts techniques et des participations aux bénéfices de l’exercice 2010.
Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement. Tel n’est pas le cas en l’espèce et une partie de la profession souhaiterait obtenir le plus rapidement possible des explications sur ce volet, d’autant que l’exposé des motifs de la mesure est, lui-même, loin d’être limpide. Celui-ci indique que« la part des produits inscrits en compte au titre des intérêts techniques et des participations aux bénéfices de l’exercice 2010 (c’est-à-dire la part des produits inscrite en compte en janvier 2011 et correspondant à des intérêts courus au titre de 2010) n’est pas retenue. Cette mesure ne s’appliquerait donc qu’aux intérêts inscrits en compte sur le compartiment euro des contrats multisupports à compter du 1er janvier 2011 (y compris ceux produits par des versements antérieurs) ».
Les assureurs doivent adapter leur système d’information.
Le rendement de la mesure, dont l’objectif est de contribuer au financement de la dette sociale (2), est estimé par le gouvernement à 1,6 milliard d’euros en 2011. Quel en sera le coût pour les assureurs ? Important si on les écoute au regard des développements des systèmes d’information qui devront être mis en œuvre - les exemples chiffrés sur les règles de restitution en témoignent - alors qu’ils viennent de digérer la mise en place de la taxation des capitaux décès, en vigueur depuis le 1er janvier.
(1) Modification de l’article L. 136-7 du Code de la Sécurité sociale.
(2) Portée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades).