Décès du bénéficiaire : attention aux droits de succession !

Les Echos - 01/10/10 

Décès du bénéficiaire : attention aux droits de succession !

Voici l'exposé de la situation : monsieur et madame sont mariés sous le régime légal de la communauté. Ils ont chacun un contrat d'assurance-vie alimenté par des fonds communs, dont l'autre est le bénéficiaire. Monsieur décède. Quel est le sort des contrats ? Conformément au Code des assurances, le contrat souscrit par monsieur au profit de madame, n'entre pas dans la masse de communauté et par suite, sa valeur n'a donc pas à être partagée entre les héritiers. Mais quid du contrat de madame ?

Par une réponse ministérielle Baquet du 29 juin 2010, l'administration fiscale revient sur sa position et considère désormais qu'au plan fiscal également, la valeur du contrat souscrit par l'époux marié sous un régime de communauté qui survit à son conjoint, qui en était institué bénéficiaire, doit faire partie de l'actif de communauté à répartir entre la succession et l'époux survivant. Attention, cela ne modifie rien pour les capitaux reçus par l'époux survivant au titre du contrat souscrit par le conjoint décédé qui restent en dehors de la communauté, et donc de toute succession (lire article ci-dessous). Avec cette réponse ministérielle, faire du conjoint le bénéficiaire crée dorénavant un risque de taxation d'une partie du contrat si celui-ci décède avant le souscripteur. En effet, la valeur du contrat qui se poursuit accroît la masse de communauté et par là même la masse successorale taxée entre les mains des héritiers autres que le conjoint qui, lui, est exonéré.

Les solutions pour y échapper

Cette nouvelle position doit inviter les souscripteurs à s'interroger sur la modification du choix du bénéficiaire ou de leur régime matrimonial. En effet, désigner le conjoint comme bénéficiaire du contrat n'est plus forcément la meilleure solution en termes de stratégie patrimoniale. Mieux vaut souvent porter les enfants comme bénéficiaires de l'assurance-vie, ils pourront notamment cumuler les abattements fiscaux de l'assurance-vie (152.500 euros) et des droits de succession (156.974 euros). Pour le conjoint, de toute façon exonéré de droits de succession, il sera toujours possible d'aménager une part plus importante dans la succession.

Néanmoins, en cas de maintien du conjoint en qualité de bénéficiaire, il est conseillé, pour échapper à la nouvelle règle, de rechercher l'origine précise des capitaux qui ont servi à alimenter le contrat. S'il s'agit de deniers propres à l'un des conjoints (succession, donation, etc.), alors il sera possible soit de qualifier le contrat de bien propre, soit de revendiquer une récompense.

Dans le cas contraire, la nouvelle doctrine administrative s'applique. Pour y échapper, il est possible d'adapter son régime matrimonial, d'autant qu'en présence d'enfants majeurs l'homologation par le tribunal de la convention matrimoniale notariée n'est plus requise. Il peut être alors préconisé d'adopter, soit le régime de la communauté universelle avec une clause d'attribution intégrale au profit du conjoint survivant, soit uniquement une clause de prélèvement (préciput) en pleine propriété portant sur le contrat. Cette dernière a le mérite d'être plus ciblée et souvent plus appropriée qu'une communauté universelle. S'agissant d'un avantage matrimonial, le conjoint recevra le contrat qu'il a souscrit sans compte à rendre ni à la communauté, ni à la succession.

PAR ISABELLE FLEURET

Les Echos.