08/09/2010 - Le Figaro
L'âge légal de la retraite passera bien de 60 à 62 ans, a confirmé Nicolas Sarkozy. En revanche, la pénibilité constitue «le point central des avancées». Revue des modifications annoncées ce mercredi. Réactions en vidéo avec iTélé.
Le gouvernement avait promis des avancées au lendemain la mobilisation organisée mardi 7 septembre contre la réforme des retraites. Dans un communiqué diffusé par l'Elysée, le président de la République, Nicolas Sarkozy s'est dit «attentif» aux préoccupations des manifestants. «C'est une réforme essentielle. Il est donc normal qu'elle suscite des inquiétudes et des mobilisations importantes, comme cela a été le cas hier. Les organisations syndicales sont dans leur rôle lorsqu'elles appellent à des manifestations ou à des grèves. Je suis attentif aux préoccupations qui sont ainsi exprimées», a dit le chef de l'Etat.
Pénibilité
Le texte originel prévoit que les personnes reconnues en incapacité au taux de 20% ou plus pourront continuer à partir en retraite à 60 ans. La nouvelle mouture prévoit d'accorder également ce droit aux salariés dont l'incapacité est comprise entre 10% et 20%, à condition qu'une commission constate que ces salariés restent soumis à des facteurs de pénibilité. Concrètement, «avec ce seuil, on inclut les troubles musculo-squelettiques de la caissière qui scanne des articles ou de la secrétaire qui tape à l'ordinateur toute la journée, ou le mal de dos du manutentionnaire», illustre une source élyséenne. Cette commission sera «pluridiciplinaire», c'est-à-dire qu'elle incluera des médecins, des ergonomes mais aussi, sans doute, des partenaires sociaux - un point à préciser par décret, après une nouvelle consultation des syndicats.
COÛT: 300 millions d'euros par an, pour un nombre estimé de 20.000 bénéficiaires supplémentaires chaque année. Cette somme à la charge de la Caisse accidents du travail-maladies professionnelles. Autrement dit, des entreprises, puisque cette branche de la Sécu est exclusivement financée par des cotisations patronales - or le gouvernement n'entend pas que cette branche, grosso modo à l'équilibre financier, s'installe durablement dans le déficit.
Accord d'aménagement de fin de carrière
Les branches professionnelles et les entreprises pourront signer des accords d'aménagement de fin de carrière (temps partiel, tutorat...) pour les salariés exposés à des facteurs de pénibilité (travail de nuit, port de charges lourdes, exposition au bruit ou à des produits chimiques, tâches répétitives...). Rien d'obligatoire, mais les branches signataires bénéficieront d'une aide financière publique. «Un peu comme la loi Robien», note une source élyséenne dans une drôle de référence à ce texte... qui encourageait les entreprises à réduire leur temps de travail, avant que cela ne devienne obligatoire avec les lois Aubry. Pas question toutefois que ces accords prévoient une cessation d'activité anticipée : l'exécutif ne veut pas recréer créer de nouveaux régimes spéciaux. Enfin, les agriculteurs pourront bénéficier du dispositif pénibilité.
COÛT: le «fonds public expérimental» pourrait être doté par l'Etat de quelques dizaine de millions d'euros.
Médecine du travail
La prévention de la pénibilité sera intégrée aux missions des services de santé au travail. Le gouvernement devrait aussi accepter un amendement parlementaire les dotant d'une gouvernance paritaire (patronats-syndicats), alors que jusqu'ici ils dépendent uniquement des chefs d'entreprises. Enfin, les entreprises ne se dotant pas de plans de prévention de la pénibilité seront frappées d'une pénalité représentant 1% de leur masse salariale.
Carrières longues
Une exception sera faite au principe selon lequel les modifications de règles du jeu en matière de retraites s'appliquent toujours par année de naissance. Aménagement complexe mais aux conséquences très concrètes pour les personnes ayant commencé à travailler avant 18 ans et nées avant 1960. Exemple cité par la présidence de la République: un homme né en 1953 et ayant travaillé sans interruption depuis ses 16 ans peut actuellement partir en retraite à 58 ans. La réforme aurait dû repousser cette possibilité à ses 59 ans ; ce sera finalement 58 ans et quatre mois.
COÛT: 350 millions au total, d'ici 2018.
Polypensionnés
Les personnes ayant passé moins de 15 ans dans la fonction publique et le reste de leur carrière dans le privé sont jusqu'ici «transférées» dans le régime général (Cnav) pour toucher leur retraite. Avec une double conséquence: l'impossibilité de bénéficier du calcul de la pension sur les six derniers mois de salaire, et un désagréable rappel de cotisation de la Cnav. Cette question des «titulaires sans droits» sera largement atténuée en ramenant à deux ans la durée de travail dans l'administration nécessaire pour toucher une retraite de fonctionnaire. Les autres cas de personnes ayant cotisé à plusieurs régimes au cours de leur carrière feront seulement l'objet d'un rapport, pour recenser les gagnants et les perdants d'une éventuel le harmonisation des règles.
COÛT: neutre pour les finances publiques, selon l'Elysée.
Fonctionnaires mères de trois enfants
Celles qui disposeront de 15 ans de service conserveront la possibilité de partir en retraite à tout âge, avec les mêmes conditions financières qu'actuellement, à condition d'être à moins de cinq ans de l'âge de la retraite dans leur catégorie (60 ans en général, 50 ou 55 ans chez les policiers, aiguilleurs du ciel...) au moment de l'entrée en vigueur de la loi. Cette possibilité sera ensuite supprimée, comme prévu.
COÛT : 200 millions d'euros par an, pour un nombre total de 25000 bénéficiaires environ.
Le Figaro.